A l’occasion des 40 ans du statut général des fonctionnaires initié par Anicet Le Pors en 1983, une cinquantaine de syndicalistes, militantes et militants d’associations, responsables politiques, chercheuses et chercheurs ont publié la tribune suivante
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Nous vivons dans une société en constante évolution, aiguillonnée par les échanges intellectuels, culturels et artistiques, par les progrès techniques et scientifiques, l’évolution des processus de production, par l’abondance d’informations, de savoirs et de richesses. Mais, nous vivons aussi dans une société confrontée aux périls majeurs que sont les inégalités et les dominations de toutes sortes, en particulier les inégalités de revenus, qui explosent, et accaparement du patrimoine par un petit nombre, les libertés publiques qui sont écornées, le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité.
Syndicalistes, militantes et militants d’associations, responsables politiques, chercheuses et chercheurs, nous sommes soucieux d’ouvrir des perspectives de transformation sociales et écologiques à même de répondre à ces défis.
Les services publics, un bien irremplaçable
Parce qu’ils permettent de soustraire de la sphère marchande et de la recherche du profit immédiat des pans essentiels des rapports sociaux, parce qu’ils servent l’intérêt général dans une perspective de long terme, soucieuse des ressources et respectueuse des personnes, parce qu’ils privilégient la coopération et la mutualisation dans la mise en œuvre effective des droits pour tous, dans la prise en charge des besoins collectifs, dans la promotion du bien commun, les services publics et la fonction publique sont des atouts précieux.
Aussi, nous refusons et combattons les politiques qui réduisent le champ de l’action publique ou intègrent au cœur même des services publics les logiques du marché, orchestrant la dégradation du service rendu aux populations et la désespérance dont se nourrissent les forces anti-démocratiques. Il est temps d’affirmer que les services publics sont des leviers permettant d’assurer à tous un égal accès aux droits fondamentaux, de faire reculer le sexisme, les inégalités et les discriminations, de mieux répondre aux besoins de la santé de tous et aux défis majeurs qu’impose la catastrophe écologique.
Pour peu qu’on se donne les moyens d’une politique fiscale ambitieuse et juste, les richesses existent aujourd’hui pour financer la réparation des services publics et de la protection sociale, affaiblis par des années de néo-libéralisme et d’austérité, mais aussi pour étendre l’action publique à de nouveaux champs comme l’autonomie face au vieillissement ou la lutte contre le réchauffement climatique.
Des fonctionnaires-citoyens au service de la Nation, de la justice et de la démocratie
Il est temps de reconnaître et de soutenir le rôle des fonctionnaires, dont l’action est entièrement dévouée à l’effectivité des droits, à l’égalité de traitement, à la continuité du service, à la recherche des solutions nouvelles aux problèmes que rencontrent au quotidien les populations, qu’ils soient récurrents ou inédits.
Les discours faussement louangeurs contredits par des politiques rétrogrades ne sont plus acceptables.
Nous plaidons pour une Fonction publique qui place les agents en situation de responsabilité, en les préservant de la soumission aux intérêts particuliers, en leur garantissant des droits individuels et collectifs, en évitant la précarité, tout ceci constituant des garanties pour les citoyens d’une Fonction publique neutre et impartiale.
Parce qu’il est une richesse et un levier majeur de justice sociale, point d’appui pour les conquêtes sociales de tout le salariat, nous affirmons qu’il faut promouvoir le statut général des fonctionnaires, et ainsi réaffirmer le choix d’une fonction publique sous statut, c’est-à-dire à la disposition de la Nation, reconnaissant aux fonctionnaires leur rôle et leurs droits de citoyen ou citoyenne.
Des fonctionnaires qui doivent être véritablement reconnus
Nous avons besoin d’une Fonction publique qui garantisse une rémunération et une retraite dignes, l’exercice d’un métier, l’occupation d’un emploi et le bénéfice d’un grade en rapport avec les qualifications et les missions de l’agent.e, une Fonction publique renforcée par une politique de l’emploi et une politique salariale ambitieuses, indispensables à des services publics de qualité.
Parce que la démocratie sociale est une dimension constitutive d’une société démocratique, il y a urgence à rétablir et à rénover les cadres d’expression et de participation aux décisions, par lesquels les fonctionnaires expriment leurs besoins et leurs revendications, échangent avec la population, afin que le service public reste toujours en phase avec les besoins de celle-ci.
Saluer les 40 ans du statut et lui donner un avenir
40 ans après la loi de juillet 1983 qui institue le statut contemporain, démocratique et fédérateur, résultant d’un siècle de luttes et de conquêtes sociales, nous réaffirmons l’actualité d’un statut, qui ne soit pas un texte sacré, mais la réponse aux exigences, évolutions, mutations de notre époque, sur la base des choix fondamentaux ancrés dans l’histoire.
A l’exact inverse de cette ambition de progrès social, la loi de 2019 dite de «transformation de la Fonction publique», outil permettant tous les reculs, doit être abrogée.
Ensemble, nous agissons et agirons pour un statut porteur d’avenir, de citoyenneté et d’intérêt général.