Introduction

Aujourd’hui, la population exprime toujours un fort attachement aux services publics mais s’interroge sur leur fonctionnement et s’inquiète de leur présence de plus en plus inégale sur le territoire.

La perception moderne du Service Public s’est construite au terme d’un long processus historique. Les luttes populaires pour la liberté, l’égalité, la reconnaissance des droits humains universels, la solidarité et la justice sociale y ont puissamment contribué. En particulier, à l’issue de la seconde guerre mondiale, un puissant consensus autour du programme du Conseil National de la Résistance (CNR) s’est dégagé pour voir en lui un vecteur essentiel de l’intérêt général.

La vocation première des services publics est de répondre aux besoins de la population. Il leur faut donc garantir l’exercice effectif des droits fondamentaux pour toutes et tous, sans discrimination d’aucune sorte, dans le respect des valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité et des principes de laïcité, de solidarité et d’unité territoriale qui sont ceux de la République.

Ils ont ainsi un rôle essentiel dans le dynamisme économique et permettent d’orienter, dans la nécessaire cohésion, l’activité générale vers le progrès social. Il en est de même pour favoriser l’activité économique, industrielle et paysanne, la relocalisation et l’organisation démocratique des transitions énergétiques, environnementales et climatiques.

Faire le choix de cette logique d’intérêt général c’est faire celui d’une société en faveur de l’égalité, de la démocratie, et de l’organisation de la solidarité. Mais, depuis plus de trois décennies, c’est ce choix qui est remis en cause par des attaques virulentes et systématiques dans le cadre de la mondialisation en faveur du seul intérêt des multinationales.

Les services publics sont le plus souvent présentés par les libéraux comme une entrave à la libre entreprise alors même que leur présence est un critère de choix important pour l’implantation des entreprises. Au
niveau national, l’abandon des missions de service public, de l’emploi public et la volonté de mettre fin au statut déjà malmené des personnels de la fonction publique font désormais partie des priorités affirmées de l’offensive libérale. Celle-ci est menée au prétexte d’une plus grande efficacité économique avec des services au moindre coût.

Pour quels résultats ?
Les catastrophes sociales et écologiques provoquées par les dogmes et les recettes libérales sont connues : vouloir tout mettre en concurrence et privatiser tout ce qui peut être rentable provoque la dégradation des services rendus aux usagers et une surexploitation des hommes et de la nature. Ces choix ont conduit à la désertification de nombreux territoires, au développement des inégalités de traitement et à la déconnexion entre le coût réel et le prix du service rendu : qui est maintenant capable d’estimer ce que va lui coûter un voyage avec la SNCF, le coût d’un médicament…? Nous sommes ainsi passés d’une situation de services publics répondant aux besoins des usagers à une logique commerciale, fondée sur la concurrence et la compétitivité, où les « clients » doivent s’adapter à une offre fluctuante de service avec une qualité dépendant des moyens de chacun. Dans ce cadre, les services publics sont souvent réduits à un rôle de dernier filet de protection pour les plus démunis. Ils ne parviennent plus, faute de moyens humains et budgétaires, à s’opposer au creusement des inégalités éducatives, sociales et territoriales.

Pour les agents des services publics, de plus en plus précarisés et de moins en moins nombreux au contact direct des usagers, cette situation conduit au développement de phénomènes de stress, de burn-out et augmente les risques psychosociaux. Leur seul dévouement ne saurait compenser le manque de moyens. Au final, cette politique de renoncement aux services publics a un coût humain, social, écologique, et même un coût économique insoutenable. Elle génère chômage, précarité et pauvreté, laissés pour compte et exclus, dégradation de la santé et de l’environnement, gabegie financière et abandon d’une politique de l’aménagement équilibré du territoire. Elle provoque aussi une perte de crédibilité dans l’action collective et rend plus difficile le débat démocratique sur ce que doit être le Service Public, ses missions, l’étendue de son rôle et son mode de fonctionnement.

Mais ces choix politiques des gouvernements successifs sont contestés et engendrent des formes multiples de résistance citoyenne tant du côté des usagers que des personnels. Nombreuses sont les fermetures de maternités, d’hôpitaux, de gares et de lignes ferroviaires qui ont été enrayées, sans compter les projets abandonnés du fait de la mobilisation des usagers, des personnels et des élus. Dans le domaine de l’eau, une vague de remunicipalisation se développe et s’accélère dans le monde ces 15 dernières années avec 235 cas dans 37 pays qui touchent plus de 100 millions de personnes. Les États-Unis et la France (siège des plus grandes multinationales de l’eau avec Suez et Veolia) sont les premiers concernés. La résistance et la reconquête sont possibles !

Dans les interstices laissés par le libéralisme, les solutions locales et individuelles impulsées notamment par le milieu associatif et l’économie sociale et solidaire fleurissent pour satisfaire aux besoins qui demeurent. Ces initiatives sont diverses et peuvent être contradictoires. Quand elles respectent le sens du collectif et l’expression démocratique, elles peuvent être un point d’appui pour reconquérir les solidarités. La Convergence se doit de prendre appui sur celles-ci et de promouvoir des réponses d’ensemble en favorisant la mise en commun des ressources. Elle doit aider à faire converger toutes les initiatives, y compris les formes nouvelles (Nuit debout, biens communs, Alternatiba, …) et ainsi contribuer à générer de nouveaux outils de mobilisation. C’est d’autant plus urgent que des possibilités de combats unitaires au plan syndical se dessinent dans la suite du grand mouvement contre la loi travail et que s’affirment aussi l’engagement et la volonté de la jeunesse de jouer un rôle dans la construction d’une société solidaire, égalitaire, féministe, écologique, qui réinvente le sens de l’intérêt général.
Dans cet élan, la Convergence souhaite, à travers ce manifeste destiné à s’enrichir au fil des luttes et des débats, porter une vision nouvelle du Service Public du 21e siècle capable de réduire les inégalités, de prendre en compte les évolutions de la société et la nécessaire transition écologique.

Nous affirmons qu’il est nécessaire d’avoir des prélèvements obligatoires proportionnels à ses moyens dans le cadre d’une fiscalité juste et progressive, quand, en contrepartie, les citoyennes et les citoyens bénéficient de services auxquels ils n’auraient pas accès autrement.

Pour la Convergence, les services publics doivent impérativement assurer :
 le droit à la protection sociale s’organisant autour de la Sécurité Sociale et de ses piliers qui doivent être renforcés et élargis : droit au travail, à la retraite et à un revenu décent, droit à la santé, droits liés à l’aide à la famille et à la personne depuis la naissance jusqu’à la mort, et couvrant le handicap et la perte d’autonomie ;
 le droit à l’éducation, à la formation, à la culture, aux loisirs,… ;
 le droit à la sécurité publique (justice, police, défense) ;
 le droit à l’eau, à l’énergie, aux transports, au logement, à l’information, à la communication et aux nouvelles technologies,… Les services publics doivent, plus généralement, garantir l’égalité dans l’exercice effectif de ces droits sur l’ensemble du territoire national. Ces objectifs nécessitent une politique ambitieuse d’emplois publics ainsi qu’une autre répartition des richesses et une profonde transformation démocratique.

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