Avant-Propos – Convergeons pour Reconquérir le Service Public

Les services publics qui doivent permettre sans discriminations l’accès et l’exercice effectif des droits, sont donc des vecteurs d’égalité. Ils sont également vecteurs de développement économique et social puisqu’ils participent aux politiques d’aménagement du territoire et sont la première raison d’implantation des personnes et des entreprises. Ils permettent de faire prévaloir l’intérêt général sur les intérêts financiers : comment parler d’un droit du travail protecteur des salariés, d’égalité femmes-hommes, de ré-industrialisation, de démocratie, de transition écologique si aucune institution, si aucun service public n’est chargé de leur mise en place et d’en garantir l’effectivité ?

Or les services publics sont depuis 30 ans progressivement privatisés, démantelés. Les objectifs qui leur sont assignés sont désormais des objectifs financiers de rentabilité : la satisfaction des besoins des usagers, l’aménagement équilibré du territoire, l’accès effectif aux droits passent au second plan quand ils ne sont pas purement et simplement abandonnés.

Le résultat est la désertification de zones entières de notre pays et la paupérisation de pans entiers de notre population. Ce qui se passe en France se passe également en Europe. La Commission européenne n’a de cesse d’aller plus loin dans la destruction des solidarités par la marchandisation de nos sociétés. Nos gouvernements successifs l’ont hélas suivie quand ils ne l’ont pas devancée.

Ce constat-là est indispensable mais nous voulons aller plus loin et ce Manifeste n’a pas vocation à être un énième livre noir du Service Public. Au contraire ses initiateurs sont convaincus de la modernité de ce magnifique concept de Service Public qui trouva tout son essor à la Libération grâce au programme du Conseil National de la Résistance.

Nous affirmons que l’existence des services publics est nécessaire à toute alternative crédible aux politiques d’austérité. Leur démocratisation et leur reconquête sont un enjeu central. La Convergence souhaite donc, au-delà de la défense du Service Public, contribuer à l’émergence d’un projet émancipateur alternatif.

Cela nécessite de faire converger l’ensemble des forces susceptibles d’agir en ce sens : les usagers, les personnels, les élus et les organisations syndicales, associatives, politiques.

Lors de l’élaboration de ce Manifeste nous avons tenté de croiser les regards des uns et des autres. Nous avons tenté d’initier une réflexion sur l’ensemble du champ du Service Public et des relations entre services publics, biens communs, économie sociale et solidaire et monde associatif, convaincus que nous devons profiter de l’ensemble de ces énergies, de leur interaction plutôt que de les opposer.

C’est l’ensemble de ces secteurs qui subissent une attaque sans précédent de la sphère marchande.

Le 21e siècle se caractérise aussi par le développement des nouvelles technologies. Au lieu d’en faire un outil d’adaptation de l’usager aux besoins économiques de services déshumanisés, elles pourraient être un fabuleux outil d’adaptation des services publics aux besoins actuels des usagers.

Partout se lèvent des citoyens, des élus, des personnels pour tenter de faire converger leurs exigences et leurs luttes. Ces dernières années les idées de nationalisation, de socialisation, de pôle public et de démocratisation sont apparues dans le débat public. Des combats sont remportés comme celui sur la remunicipalisation de l’eau qui gagne du terrain en France mais aussi en Europe et dans le monde. Au 21e siècle l’énergie existe pour la reconquête des services publics.

L’exigence de service public se fait également entendre désormais sur des champs nouveaux : haut débit, logement, nourriture, protection de l’écosystème… cela demande donc une extension des missions et la création d’outils nouveaux.

Le 21e siècle, c’est la naissance des coordinations sectorielles sur la santé, le rail, l’eau, La Poste. C’est aussi celle de la Convergence, créée à l’initiative des collectifs de défense et de développement des services publics locaux.

Aujourd’hui, on observe une réactivité nouvelle et forte des citoyen-ne-s dès les modifications des horaires d’ouverture d’une Poste, la suppression de lits ou d’un service dans un hôpital, la fermeture d’un guichet SNCF… En effet, désormais, la conscience de ce que cela signifie a progressé : un service public qui ferme ce sont les autres services et les emplois qui sont menacés. C’est la vie de son village ou de sa ville, de son quartier qui est fragilisée.

Grâce à la mobilisation des usagers, des personnels et des élus, de nombreuses victoires existent mais restent trop dispersées et discrètes.

Il est grand temps de faire émerger, tous ensemble, l’exigence citoyenne de Service Public dans le débat public.

Ce Manifeste veut donc être d’ abord un outil de mobilisation et de débats. Il ne prétend pas être achevé : tout au contraire son objet est d’être débattu au sein des organisations, collectifs et coordinations, d’être un outil pour l’action, de susciter des débats publics afin que remontent des idées à creuser, des pistes à développer.

C’est tous ensemble, usagers-personnels-élus, que nous réussirons à créer un vaste mouvement contre les politiques d’austérité, pour la reconquête du Service Public.

Pour la convergence Nationale des collectifs de défense et de développement des services publics, Michel Jallamion, président de la Convergence

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