Pour la reconquête et le développement des services publics Contribution de Solidaires Finances Publiques

Qui pourrait consacrer 8000 euros par an pour que son enfant aille au collège et assurer les études de celui-ci tous les ans, d’autant plus s’il poursuit ces études ? A l’évidence peu de monde. Voici schématiquement posé le principe d’une nécessaire et légitime contribution publique pour assurer à tous l’accès aux services publics. Est-il juste de faire reposer ce financement sur les seuls ménages alors que l’enseignement permet à une société de progresser globalement (l’entreprise emploie une main d’œuvre qualifiée, le savoir se transmet plus facilement…) ? On le voit, il est logique que chacun, entreprises et ménages, contribuent.
Voici posé le principe d’une répartition de la contribution publique, l’impôt, sur tous les agents économiques et sur toutes les sources de richesse. Fondamentalement, le rôle des impôts dans la redistribution et la solidarité nationale est évident : il peut contribuer à les réduire pour réduire les inégalités de revenus et de patrimoine. Voici posé, enfin, le principe d’une contribution progressive réclamée « en fonction des facultés » de chacun (article 13 de la déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen).

Les exemples pourraient se décliner à l’envi, mais l’enseignement demeurerait le même. Sans ressources publiques, point de services publics. Une minorité pourrait s’offrir les services privés, et une immense majorité ne pourrait accéder aux besoins aujourd’hui pris en charge collectivement par la société par les services publics. Sans ressources publiques, point de société, et sans impôt juste, point de société juste.

Les grands principes du service public, aujourd’hui largement affectés par la logique libérale, ne sauraient donc être défendus sans y intégrer la dimension fiscale. Car la solidarité s’exprime aussi bien dans le service rendu, d’autant plus s’il est gratuit, aisément accessible et véritablement efficace, que dans le financement dudit service. Car le financement de services qui bénéficient pourtant à toute la collectivité ?
La redistribution s’opère par le service public mais aussi par la structure des recettes. Les orientations libérales visent à augmenter les impôts les plus injustes (TVA, droits indirects, impôts locaux) et achever ce qui reste de justice sociale au travers de la baisse de la progressivité de l’impôt sur le revenu et de l’imposition du patrimoine. Un tel déséquilibre conduirait à l’explosion des inégalités, rendue possible par les allègements d’impôts effectués au profit d’une minorité et pèserait lourdement sur le pouvoir d’achat des ménages. Ce mouvement de hausse des inégalités est déjà à l’œuvre.

L’impôt, principale source de financement des services publics, doit donc être justement réparti. Or, c’est loin d’être le cas actuellement : les allègements fiscaux coûteux (qui expliquent une part significative de la hausse de la dette publique) intervenus depuis 20 ans ont prioritairement bénéficié aux 5 % des ménages les plus riches et aux entreprises alors que les augmentations récentes ont lourdement pesé sur les classes moyennes (TVA, impôt sur le revenu).

En particulier, les dernières années ont été très intenses sur le front fiscal : abaissement de l’impôt sur le revenu, création de multiples niches fiscales, abaissement de l’imposition des sociétés, allègement de l’imposition du patrimoine et, dans le même temps, augmentation de certains droits indirects sur la consommation, augmentation de la contribution sociale généralisée, le tout sur fond de transferts de compétences de l’Etat vers les collectivités locales qui ont conduit à alourdir la fiscalité locale pesant sur les ménages. Le basculement fiscal est net.

Comment inverser la tendance, qui plus est dans un contexte de concurrence fiscale et sociale qui limite objectivement les marges de manœuvres fiscales ?

La première des urgences est de rétablir quelques vérités fiscales. L’impôt finance l’action publique et reste un garant de la cohésion sociale (au travers du rôle qu’il doit jouer dans le financement des services publics et dans la réduction des inégalités) sans toutefois être l’ennemi de l’emploi (l’action publique est un des principaux facteurs d’attractivité du territoire). Son rôle peut, et doit, s’étendre au plan international, au travers d’une harmonisation fiscale au sein de l’Union européenne tout d’abord, mais également par une véritable lutte contre la fraude fiscale, et enfin par la mise en place de contributions internationales permettant de financer les solidarités. Au plan national, il est tout à fait possible, mais surtout éminemment souhaitable sur le plan de la justice fiscale et sociale, de refondre les impôts directs progressifs, sur les revenus et le patrimoine. Une système fiscal plus simple, plus juste et plus stable est une nécessité économique, sociale et démocratique. Rien n’empêche cela, ni les textes de l’Union européenne, ni la réalité de la concurrence fiscale. Les comparaisons, fréquemment invoquées pour justifier le recul des impôts les plus justes, peuvent aisément s’expliquer par le niveau des contreparties des ressources publiques, volontairement occultées par le discours dominant.

Un financement plus juste, plus simple, plus stable mais aussi plus efficace de l’action publique est possible et souhaitable. Défendre les services publics, c’est nécessairement avancer que la société prend collectivement en charge certains besoins sociaux pour que chacun puisse en bénéficier. C’est aussi, tout aussi nécessairement, en défendre un financement juste. C’est au fond, tout simplement, faire de la justice fiscale et de la justice sociale les garants de l’intérêt général et des solidarités.

Au-delà, il reste à assurer une présence physique territoriale et des moyens adéquats qui garantissent à chacun un accès aisé aux services publics et une qualité de l’action publique. Mais sous l’impact des politiques libérales et, plus récemment, de rigueur, la présence du service public se réduit comme peau de chagrin. Ainsi, à la Direction générale des finances publiques (DGFiP), le nombre de trésoreries de proximité est passé de 4200 en 1998 à 2600 en 2014. Or, ces trésoreries jouent un rôle essentiel tant pour les collectivités territoriales que pour le public. Ce mouvement de repli accentue les inégalités territoriales et dégradent la qualité et l’efficacité de l’action publique. Et ce au détriment des économies locales et de la cohésion sociale…

Une réorientation des politiques publiques est donc une urgence sociale et économique. C’est en ce sens que le syndicat national Solidaires Finances Publiques inscrit son action et s’engage dans le processus de convergence de reconquête et de développement des services publics.

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